27 mai 2025
Temps de lecture : 4 min
Google a dévoilé son futur moteur de réponses lors de son grand raout I/O 2025 du 20 mai 2025. Le moins que l’on puisse dire, est que cet événement n’est pas passé inaperçu dans le secteur de la tech et des médias.
La grande annonce est celle du déploiement d’AI Overviews dans 200 pays, avec la prise en charge de plus de 40 langues. Pour l’instant, rien n’est officiellement prévu pour la France, mais des tests sont réalisés dans plusieurs pays d’Europe.
Avec Overviews, Google n’affiche plus de liens vers des sites, mais des réponses aux questions posées par les utilisateurs en s’appuyant sur les pages web les réponses les plus pertinentes.
Overviews généralise le principe des featured snippets, ces extraits de sites qui apparaissent depuis 2016 en haut des pages de résultat de Google en « position zéro ». Sauf que le moteur n’extrait pas un morceau de texte de l’article le plus populaire, mais compose un résumé personnalisé sur la base de l’ensemble des sites de son index.
Google cherche à « rassurer l’écosystème web » en affirmant que les utilisateurs qui cliquent sur des liens depuis AI Overviews passent davantage de temps à consulter les articles qu’auparavant. On peine à croire ce genre de déclaration, tant l’impact sur le trafic des positions zéro dépend du type de requête et l’exhaustivité de la réponse. Quand la requête est incomplète, le taux de clic vers le site augmente naturellement. Quand la réponse est enrichie, les clics disparaissent, bien évidemment.
Sur mobile, où la disponibilité des utilisateurs est moindre, près de 60% des requêtes ne donnent lieu à aucun clic, soit qu’ils soient satisfaits de la réponse, soit qu’ils refassent une requête. Quoi qu’il en soit, dans une société où la bataille de l’attention se renforce chaque jour, le clic tend à se raréfier lui-même. Les moteurs de réponses proposés par les interfaces d’IA répondent à ce besoin d’efficacité.
Comme le dit Olivier Martinez, expert et formateur IA, dans sa newsletter IA-Pulse:
« Nous nous battions pour être dans les 3 premiers liens d’une page de résultats de recherche qui en comportait 10, nous allons probablement nous battre pour être l’unique entité ou idée citée dans la réponse construite par un modèle de langage délivrée par une interface conversationnelle. »
Andréa Bensaid, patron de la société de conseil en référencement naturel Eskimoz, se veut rassurant aussi sur l’avenir de son métier, malgré l’essor des interfaces conversationnelles (Perplexity ou ChatGPT). Selon lui, « les piliers du SEO sont plus importants que jamais ! »
Pour appuyer son propos, il a comparé les résultats de requêtes sur Google et Perplexity et il a constaté que les sites du top 10 Google dominent aussi les réponses IA. En somme, que vous posiez une question à Google ou à une IA, les mêmes critères de qualité et de pertinence s’appliquent.
« Le SEO ne disparaît pas: il s’adapte, il se transforme et il devient plus exigeant », conclut-il.
C’est sans doute vrai à court terme, tant que l’interface de consultation des contenus sera la page web. Il faudra toujours une sélection des meilleurs sites, des meilleures pages pour répondre à une requête.
Mais à mesure que les interfaces conversationnelles vont se généraliser, la page web – mise en forme unique d’une information – va s’effacer au profit de l’information elle-même. Le SEO demain dépendra sans doute plus de la capacité des éditeurs à bien structurer leur information, à la vérifier, l’actualiser qu’à la mettre en forme. Cette mise en forme étant gérée par l’utilisateur, sur mesure au niveau de son interface, et dans le format de son choix (audio, texte, vidéo…).
Ce qu’Olivier Martinez se résume ainsi:
« Les sites web ne vont certainement plus être ce qu’ils sont actuellement. S’ils ne vont probablement pas disparaître, leur fonction change: ils passent de la vitrine au back-office du savoir.«
Il y aura toujours des pages de proposition de contenus non-demandés, comme Google Discover qui cohabite avec le Search ou les têtes de gondole qui s’ajoutent aux rayons des supermarchés. Mais pour ce qui est du besoin exprimé par l’utilisateur, l’interface des sites tendra à se résumer en un micro où l’on posera sa question qui ira puiser dans les bases de données du site, et des moteurs.
La publicité dans Google AI Overviews ne devrait pas être bouleversée et les premières maquettes montrent des blocs contextualisés assez classiques par rapport à la requête des utilisateurs.
En revanche, pour les médias, la fin progressive du clic et des pages web, conduit à repenser le modèle d’affaires publicitaire. C’est pourquoi aujourd’hui, Le Monde ou l’AFP s’orientent vers une licence globale d’utilisation cédée aux plateformes d’IA. Le Monde a conclu un accord avec OpenAI puis un autre récemment avec Perplexity.
L’AFP a conclu pour sa part un autre accord avec Mistral, pour exploiter les 2300 dépêches produites chaque jour en six langues par l’agence. Il offre aussi durant trois ans au Chat de Mistral l’accès aux archives de l’agence depuis 1983, soit 38 millions de dépêches. Le tout, moyennant un chèque qui s’élèverait à plusieurs millions d’euros (mais qui semble faible eu égard au budget de l’agence (environ 330 millions d’euros).
Toute la question est de savoir si cette manne sera reconductible tous les deux-trois ans. Ou bien, si, une fois entraînées par les data initiales, les IA des plateformes auront besoin de mises à jour, beaucoup plus légères… et beaucoup moins rémunérées. En gros, les médias ne sont-ils pas en train de céder leurs bijoux de famille pour un plat de lentilles ?
Le projet Spinoza qui consiste à créer son propre moteur sur une base open-source, semble plus à même de préserver l’indépendance future des médias.
En tout état de cause, une négociation globale des droits d’utilisation des contenus des sites par un organisme comme le DVP (Droits voisins de la Presse), apparaît souhaitable. Pour peser sur les négociations avec les plateformes et faire valoir les intérêts des petits, comme des gros médias.
Google transforme son moteur de recherches en moteur de réponses. L’arrivée d’AI Overviews redistribue les cartes du SEO, remet en cause le clic, fragilise le modèle publicitaire des médias et oblige tout l’écosystème à repenser sa stratégie face aux plateformes d’IA.
6 idées clés à retenir
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