Bilal El Alamy (PyratzLabs) : "Nous ouvrons un lieu de 1 000 m2 consacré au Web 3 à Levallois"


  • L'un des cofondateurs de PyratzLabs explique pourquoi il estime que les entrepreneurs du Web3 ont besoin de plus d'accompagnement. 
  • Il revient également sur le modèle d'un start-up studio qui s'est spécialisé dans le gaming et la Defi.

Minted. Vous avez cofondé PyratzLabs, start-up studio consacré aux entrepreneurs du Web3 qui vient d’officialiser une levée de 3 millions d’euros. Pourquoi ?

Bilal El Alamy. Le constat que nous avons fait, avec mes associés, c’est que la France manque de structures d’accompagnement des entrepreneurs du Web3 alors qu’il s’agit d’un écosystème encore balbutiant, parfois trop virtuel, qui gagnerait à pouvoir s’appuyer sur des lieux physiques où les gens peuvent se rencontrer dans la vie réelle. Je reçois chaque jour une multitude de CV de gens qui ont fait Polytechnique, Centrale ou HEC… Cela démontre un intérêt qu’en 4 ans dans ce secteur, je n’avais jamais vu ! Il est important de donner à tous ces nouveaux arrivants les outils et l’environnement propice à la réflexion.

C’est la raison pour laquelle nous venons d’ouvrir un lieu de 1 000 m2 à Levallois. Nous allons régulièrement organiser des évènements  - meet-ups, pitches, sessions de mentoring, hackathon - pour réunir la communauté. Nous allons également y accueillir les huit projets qui seront incubés au sein de notre start-up studio et les quelques start-up que nous allons accompagner dans une logique d’accélération.

Quel est le modèle économique de PyratzLabs ?

Aujourd’hui PyratzLabs, c’est 22 collaborateurs dont les deux-tiers sont sur la tech. Nous voulons vraiment réinventer le modèle du start-up studio. Le premier point, c’est celui du partage de la valeur. Dans le modèle classique, les fondateurs n’ont jamais le bénéfice du doute. Les start-up studios prennent 80% du capital et permettent aux fondateurs de rééquilibrer ce ratio à mesure qu’ils atteignent leurs objectifs. Rien de tel chez nous. Nous investissons 200 000 euros pour 7% du capital dans les projets que nous accompagnons. C’est un ratio fixe car il s’agit de projets vraiment early stages. 

"Nous investissons 200 000 euros pour 7% du capital dans les projets que nous accompagnons"

Nous les assistons dans deux domaines qui me semblent critiques pour la réussite d’une entreprise. D’abord la tech, avec un collaborateur de PyratzLabs qui fait office de CTO ou tech lead pour chacun des projets que nous accompagnons. Je suis, par exemple, le CTO de l'une des premières start-up made in PyratzLabs, Dogami. Ensuite la partie administrative, qu’il s’agisse du juridique ou du financier. Ce sont souvent des sujets sur lesquels les fondateurs sont plutôt naïfs et pas qualifiés. C'est Equisafe, l’entreprise que nous avions fondée avant de lancer PyratzLabs, qui les décharge de cela. Equisafe s’est spécialisée dans les formalités juridiques pour les véhicules d’investissements. 

Vous faites également de l’accélération…

C’est vrai mais on le fait de manière “accélérée”. Compter un à trois mois d’accompagnement contre 6 à 12 mois habituellement. On va plus loin que l’offre existante, qui se contente souvent d’un hébergement et de quelques mises en relation. C’est, par exemple, auditer la partie tech pour s’assurer de sa scalabilité, chose fondamentale dans la blockchain. Ou faire de même avec la partie juridique. On ne prend, sur cette offre, pas de part du capital. On se rémunère de manière classique ou via des tokens. 

Vous avez évoqué Dogami, un metaverse qui a levé 6 millions d'euros en seed fin décembre 2021. Y-a-t-il d’autres projets incubés au sein de PyratzLabs ?

Il y a Smartlink, un exchange décentralisé qui intégrera une marketplace et des offres de Defi. Il y a également Billy.live, anciennement Smooth, qui veut réinventer le ticketing via les NFT et Bloometa, une plateforme liée au gaming, qui regroupe une marketplace multi-chains et un média collaboratif, avec pas mal de données et de forums de discussions sur les jeux blockchains. Vous l’aurez compris les mots d’ordres sont marketplace, gaming et Defi. 

Vous n’avez pas d’autre secteur dans le viseur ?

Pas pour l’instant du moins car c’est là que réside notre expertise. Le but étant, évidemment, de maximiser les synergies entre chaque projet. Bloometa pourra, par exemple, profiter de la présence de Dogami au sein de notre start-up studio et The Sandbox parmi nos actionnaires.

"Bloometa pourra, par exemple, profiter de la présence de Dogami au sein de notre start-up studio et The Sandbox parmi nos actionnaires" 

On croit notamment beaucoup au gaming, un secteur qui a une histoire forte en France et qui, après la génération free-to-play, voit une nouvelle génération arriver. On est d’ailleurs actionnaires d’un club d’esport, Gamers Origin. 

De l’esport et du play-to-earn bientôt ?

Pourquoi pas ? C’est un secteur qui n’a pas vraiment de modèle économique pérenne. La plupart des équipes ont du mal à boucler leurs comptes et vivent des budgets des marques qui veulent toucher les plus jeunes. Mettre du play-to-earn dans tout ça aurait du sens. 

Quel sera votre lien avec les différentes blockchains du marché ?

Nous sommes très proches de la fondation Tezos car nous avons construit chacune de nos entreprises sur cette blockchain. C’est donc là que nous avons le plus d’expertise. Ceci étant dit, nous ne contraindrons pas les  membres à construire leur projet sur Tezos, s’ils estiment qu’il y a mieux ailleurs. 

La collection de NFT Moonbirds a récemment fait l’actualité en permettant à ses fondateurs de lever 60 millions de dollars. Montant auquel on peut ajouter les dizaines de millions d’euros issus des ventes secondaires. Peut-on parler de tokenisation du private equity, avec des start-up Web3 qui lève des millions sur une vision partagée par une communauté d’ambassadeurs acharnés ?

C’est ce qui est déjà possible depuis quelques années avec le phénomène des ICO, qui permettent de lever une somme d’argent via l’émission d’un token, sans être dilué capitalistiquement. Générer des millions d’euros de revenus en lançant une collection de NFT, c’est un peu la même chose. Cela permet, en outre, de démontrer qu’il y a un marché et qu’on est capable de générer du chiffre d’affaires. Ce qui rassure forcément les VC et autres investisseurs.

"Nous créons un club d'investisseurs adossé à notre start-up studio"

Tout est une question d’équilibre. Il ne faut, en tout cas, pas sous-estimer l’importance des fonds classiques. Qu’il s’agisse des business angels reconnus du monde de la crypto, qui peuvent vous faire gagner du temps en ouvrant leur carnet d’adresse ou des VC plus traditionnels, qui peuvent aider un projet à s’internationaliser ou recruter les pointures qui lui permettront de passer un cap. Ces VC sont de plus en plus nombreux à s’intéresser aux projets cryptos et ils peuvent clairement les aider à se professionnaliser. Raison pour laquelle nous nous employons à créer un club d’investisseurs lié à PyratzLabs.

PyratzLabs a été fondé en 2021 par 4 personnes : Bilal El Alamy, Maxime Sarthet, Thomas Binetruy et
Jacques Lalo. Bilal El Alamy est, en outre, le CTO de Dogami, projet metaverse où les chiens font la loi sous forme de NFT, qui a levé 6 millions de dollars fin décembre 2021.