Exclu : Retailink choisit Criteo ET Kamino Retail


  • Elie Aboucaya et Marianne Schneider, les fondateurs de Kamino Retail, tiennent leur première victoire d'envergure puisque leur technologie va opérer tout l'inventaire CPM de Retailink, régie retail media de Fnac-Darty.
  • Pour Criteo, qui sauve l'inventaire vendu au CPC, cela reste une déconvenue. Je vous explique pourquoi.

Petite surprise dans le monde du retail media puisque la consultation lancée par Retailink, la régie retail media de Fnac - Darty, pour désigner son partenaire de monétisation, accouche non pas d’un mais… de deux vainqueurs. C’est Kamino Retail qui remporte la gestion des inventaires display et vidéo on-site, qui sont vendus au CPM. Alors que Criteo, l’acteur sortant, garde, lui, la commercialisation de la partie “sponsored product”, ces emplacements plutôt milieu et bas de page, vendus au CPC.

C’est une surprise à plus d’un titre. D’abord parce que c’est la première consultation significative remportée par Kamino Retail, face à une concurrence très dense. Criteo, Unlimitail (l’alliance entre CitrusAd et Carrefour) et Mirakl Ads ont, eux, aussi candidaté. Même s’ils collaborent déjà avec Retailink sur la partie vidéo et que leur CV parle pour eux, les deux fondateurs de Kamino Retail, Elie Aboucaya et Marianne Schneider, passent à la vitesse supérieure avec ce gain de budget. 

“C’est une chose de faire un POC sur la vidéo, ça en est une autre de gagner une consultation d’une telle envergure et d’un tel niveau de d’exigence sur les features retail media vidéo et display, ux, webperf, intégration...”, reconnaît Elie Aboucaya, qui se félicite que cette victoire vienne valider la thèse de Kamino Retail. A savoir que les retailers vont vouloir reprendre la main sur la monétisation à mesure qu’ils vont gagner en maturité. “Et qu’ils vont, dans cette perspective, vouloir se connecter aux acteurs du programmatique plutôt que de rester circonscrits aux retail media networks”, précise Marianne Schneider. 

C’est évidemment le cas de Retailink. Retailink, c’est 17,5 millions de visiteurs uniques par moi. C’est aussi un des acteurs les plus avancés (et les plus exigeants) en matière de retail media en France. Un vrai challenge pour une tech qui n’a même pas 7 mois d’existence et une dizaine de collaborateurs. Surtout qu’il va falloir aller vite puisque les premières campagnes display transiteront par la technologie de Kamino Retail dès le premier trimestre 2024.

C’est aussi une surprise parce qu’en choisissant deux technologies bien distinctes, Alexandra Suire, la patronne de Retailink (qui n’a pas répondu à nos sollicitations), semble avoir renoncé à certaines de ses exigences. Notamment la volonté d’avoir une vision holistique de la performance de ses leviers retail media. Impossible pour un annonceur qui diffusera une campagne CPC via Criteo et une campagne CPM via Kamino de savoir si l’individu A exposé via Criteo ne l’a pas déjà été via Kamino. A noter qu’il pourra néanmoins dédupliquer les ventes générées par chacun de ces leviers, grâce à un hack mis en place par Retailink avec sa CDP, Mediarithmics. Ce qui est déjà pas mal, me direz-vous. 

“Si Retailink se résigne à choisir deux partenaires, c’est d’abord parce qu’il n’y a pas une technologie sur le marché qui répond à 100% de ses exigences”

Qu’en déduire ? Déjà, qu’aucune des candidatures n’a donné entière satisfaction. “Si Retailink se résigne à choisir deux partenaires, c’est d’abord parce qu’il n’y a pas une technologie sur le marché qui répond à 100% de ses exigences”, résume un connaisseur du secteur. C’est vrai. 

Prenons les deux autres finalistes, Unlimitail et Mirakl Ads. Le premier a vite été hors jeu car il équipe Rakuten, qui reste un gros concurrent de Retailink. Le second a un fort tropisme “marketplace”, une activité qui reste minoritaire chez Retailink. Sans compter que Mirakl et Fnac-Darty vont devenir concurrents puisque ce dernier vient de lancer une activité de marketplace en marque blanche, comme l’a fait Cdiscount avec Octopia.

Reste Kamino Retail, dont l’approche “custom” et la volonté d’ouvrir le retail media à de nouvelles sources de demandes programmatique répondent parfaitement aux exigences de Retailink sur la partie CPM, mais dont le positionnement “techno only” convient moins aux besoins de la régie sur la partie CPC. C’est un fait : Criteo dispose d’une légitimité et d’une force commerciale dont Retailink (qui préfère concentrer ses ressources commerciales à la partie qui capte l'essentiel du trade marketing, la partie CPM) a encore besoin pour prêcher la bonne parole auprès des agences médias. 

Retailink joue l'émulation... tout en gardant une porte de sortie

On peut aussi observer que choisir deux partenaires, c’est, pour Retailink, un moyen de favoriser l’émulation (même s’ils ne sont pas en concurrence directe sur les emplacements). Mais aussi de se garder une porte de sortie, si l’un des deux venait à faillir. Qui sait qui seront les leaders du secteur dans deux ou trois ans ? Le marché est très mouvant, voire cyclique. Aucune technologie ne semble, à date, faire l’unanimité puisque certains déçus de Criteo, partis à la concurrence, se sont rendu compte que l’herbe n’était pas forcément plus verte ailleurs. “C’est un business très compliqué, reconnait un retailer. Retailink, s’est peut-être refusé à faire all-in sur l’un des deux.”

Pour Criteo, c’est, à n’en pas douter, une victoire à la Pyrrhus. Déjà parce que l’adtech n’est plus la technologie qui équipe Retailink sur la partie CPM et que cet inventaire est le cœur de l’activité de Retailink. Criteo sauve donc le lot le moins important de ce point de vue. Même s’il convient de préciser que l’activité CPC est celle qui permet à l’adtech de marger le plus puisqu’aux frais de techno s’ajoutent les fees de régie prélevés par Criteo. 

C’est aussi une victoire qui n’en est pas vraiment une, car le gain d’un retailer d’envergure était la dernière chose qui manquait à Kamino pour entrer dans la cour des grands. Un premier gain qui, connaissant le côté suiveur de notre secteur, pourrait rapidement faire effet domino. Il ne fait pas de doute que les plus gros retailers n’auront désormais aucune appréhension à choisir Kamino Retail maintenant qu’un poids lourd du secteur vient de lui faire confiance.