15 septembre 2025

Temps de lecture : 4 min

Netflix, Disney+, retail media… Comment Amazon cherche à étendre son empire publicitaire

En signant un partenariat avec Netflix, Amazon poursuit sa stratégie expansionniste sur le marché publicitaire. Trop à l'étroit sur ses propres plateformes, le géant du commerce en ligne lorgne désormais sur ses rivaux pour augmenter ses recettes publicitaires. L'an passé, celles-ci se chiffraient déjà à 56 milliards de dollars.

C’est une alliance inattendue, une de plus, sur le marché du streaming vidéo. Après un partenariat avec TF1, pour diffuser ses chaînes linéaires et ses programmes à la demande sur sa plateforme, Netflix s’associe à Amazon.

Dans onze pays, dont la France, les annonceurs pourront à partir du quatrième trimestre acheter des campagnes publicitaires depuis la DSP du géant du commerce en ligne. Une étape de plus dans la volonté du groupe de Los Gatos d’ouvrir grand les vannes à tous les acteurs du secteur – comme il l’a déjà fait avec Google, The Trade Desk, Microsoft et Yahoo.

56 milliards de dollars de recettes publicitaires

Ce partenariat est un énorme coup réalisé par Amazon, lancé depuis le début de l’année dans une stratégie expansionniste sur le marché publicitaire.

Le géant semble à l’étroit sur ses propres plateformes, pourtant dominantes: son site marchand, vedette du retail media, son offre Prime Video, modèle en matière de monétisation, ou encore sa plateforme de streaming en direct Twitch, dont la popularité ne cesse d’augmenter.

Il dispose d’atouts considérables pour les séduire, malgré les risques pour ces derniers d’alimenter une machine qui grappillera leur part de marché. 

Sans faire beaucoup de bruit, Amazon s’est bâti un troisième empire. Après le commerce en ligne et le cloud, la société de Seattle s’est imposée comme un poids lourd de la publicité: elle a généré 56 milliards de dollars de recettes l’an passé.

C’est davantage que YouTube, et aussi que l’ensemble de la presse écrite mondiale. Selon le cabinet eMarketer, elle pourrait même dépasser Meta, la maison mère de Facebook et d’Instagram, d’ici à 2030. Si la publicité représente encore moins de 10% de son chiffre d’affaires, elle est devenue stratégique car elle affiche des marges bien plus élevées que son activité historique.

La force publicitaire d’Amazon s’explique d’abord par la puissance de son site, leader incontesté du commerce en ligne sur les grands marchés occidentaux. Si la concurrence se renforce dans le retail media, l’e-marchand occupe toujours une position presque hégémonique, captant près de 80% des recettes aux États-Unis et en Europe.

Il accélère aussi sur le gigantesque marché de la publicité vidéo. L’an passé, il a ajouté des spots publicitaires sur son offre Prime. Contrairement à Netflix, Amazon a choisi d’en faire l’abonnement par défaut: ceux qui ne souhaitent pas de publicités doivent payer plus cher.

Amazon propose son retail media à ses concurrents

Fort de ses positions, le groupe fondé par Jeff Bezos veut désormais s’ouvrir de nouveaux horizons, comme autant de nouveaux relais de croissance pour faire face à la saturation de son inventaire. C’est particulièrement vrai dans le retail media.

Ces dernières années, le nombre d’annonces publicitaires sur ses pages a en effet tellement augmenté, reléguant toujours plus bas les résultats organiques, qu’il est désormais très difficile d’en ajouter davantage. En janvier, il a donc lancé un nouveau service, Retail Ad Service, qui permet aux autres e-marchands d’accéder à ses technologies publicitaires.

Cet outil, encore réservé à quelques partenaires, s’appuie sur une double promesse. D’abord, la possibilité d’utiliser des outils, basés sur du machine learning, qui ont fait leur preuve pour afficher des publicités pertinentes dans les résultats de recherche, au sein de la navigation et sur les pages produit. Et donc augmenter l’engagement et le taux de conversion.

Ensuite, la capacité de toucher l’ensemble des 1.200 annonceurs actifs sur Amazon Ads, qui pourront facilement dupliquer des campagnes publicitaires sur les sites utilisant Retail Ad Service.

Avec ce service, Amazon s’apprête à concurrencer les grands acteurs du secteur, comme le français Criteo et l’américain Epsilon, racheté en 2019 par Publicis.

« Ce qui reste à voir, c’est si un nombre significatif de détaillants pourront être convaincus de s’associer à un concurrent direct », souligne cependant Sarah Marzano (Analyste chez eMarketer).

En adoptant le service, les rivaux d’Amazon renforceront en effet sa puissance financière, lui permettant potentiellement d’être encore plus compétitif. Et ils lui confieront aussi des données sur leurs clients – même si la société promet de ne pas y accéder.

La promesse d’un ciblage plus précis grâce aux données d’achat

La deuxième phase de cette stratégie d’expansion a débuté en juin. À l’occasion des Cannes Lions, Amazon a officialisé un partenariat avec Disney+, afin d’intégrer la plateforme d’enchère du créateur de Mickey au sein de sa DSP.

Cette collaboration est déjà active en Europe. Elle doit être déployée aux Etats-Unis au cours des prochaines semaines. En ajoutant l’accord tout juste annoncé avec Netflix, les annonceurs américains et européens pourront bientôt acheter, au même endroit, leurs campagnes vidéo sur les trois plateformes de streaming les plus populaires.

Pour Disney et Netflix, l’alliance avec Amazon s’inscrit dans une volonté d’élargir l’accès à leurs inventaires au maximum d’acteurs, non seulement pour optimiser le remplissage mais aussi les CPM. Cela est d’autant plus important que le nombre d’abonnés à leurs offres avec publicités ne cesse d’augmenter (94 millions par exemple chez Netflix). Dans le même temps, les deux plateformes ont dû revoir à la baisse leurs prix, sur un marché de la publicité vidéo premium de plus en plus concurrentiel.

Mais Amazon leur apporte aussi quelque chose en plus: ses données first party. Et plus particulièrement, l’ensemble de la data retail collectée sur ses clients, comme les produits achetés ou les recherches effectuées sur son site.

La société explique ainsi disposer de « centaines de milliards de signaux« , qui sont analysés par des algorithmes pour identifier les audiences les plus susceptibles d’acheter un produit ou un service proposé par une marque. De quoi affiner le ciblage, améliorer l’efficacité des campagnes… et donc vendre la publicité plus cher.

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