- Comment les éditeurs français accueillent-ils la décision de Google de déporter la responsabilité de la fin des cookies tiers sur l'utilisateur de Chrome ? C'est la question que nous avons posée à certains d'entre eux.
- Découvrez les réponses de Nicolas Danard, directeur général adjoint en charge de la monétisation et du digital chez Les Echos Le Parisien Médias.
Minted. Comment accueillez-vous l'annonce de Google ?
Nicolas Jaimes. Comme un énième report sine die. C’est une annonce qui surprend sans surprendre compte tenu des échanges sur la Privacy Sandbox. C’est aussi une annonce qui reste floue. Pour éviter d’acter par sa décision la fin définitive des cookies tiers, Google déporte la responsabilité sur l’utilisateur. Mais il n’apporte aucune précision quant aux modalités de déploiement. Sous quelle forme ? Jusqu’à quel niveau ? Quelles sont les conséquences pour l’internaute, pour le marché publicitaire ?
Pour faire le parallèle, nous sommes dans le même registre que le Distraction Control d’Apple. Il est vertueux de redonner la main et le choix final aux internautes, mais cela ne peut être exempt de pédagogie. Il ne faut pas non plus que ce soit un irritant, avec une sur-sollicitation de l’internaute.
La manière dont Google et Apple souhaitent gérer les consentements et la façon dont le choix est présenté aux utilisateurs sont deux paramètres qui exercent une influence capitale et dont les modalités ne sont pas encore clairement explicitées. Nous serons très attentifs aux prochaines annonces.
Pensez-vous que les cookies tiers sont, malgré tout, condamnés ?
L’utilisation des cookies tiers est déjà très entamée. Les autres navigateurs les ont supprimés, et in fine, quelles que soient les modalités d’action de Google, ils reculeront également sur Chrome.
Le sens de l’histoire plaide donc pour un marché qui s’en affranchit. La question n’est pas de savoir si les cokiers tiers sont "condamnés", mais plutôt à quelle échéance ? Leur obsolescence est progressive et inévitable. Ce report doit surtout être l’opportunité de continuer à tester différentes solutions alternatives.
Cette annonce change-t-elle quoi que ce soit à votre stratégie ?
Pas le moins du monde. Et ce pour deux raisons. La première, c’est que notre modèle ne dépend pas de l’open aucion. La part de l’OA dans notre chiffre d’affaires programmatique reste modérée. Notre modèle est avant tout fondé sur une stratégie de valeur, qui donne une large place au direct et aux opérations spéciales, et donc à notre data first-party, voire zéro-party.
La seconde, c’est que nous avons mis en place depuis deux ans une roadmap pour nous affranchir totalement des cookies tiers et valoriser notre data propriétaire : construction d’un écosystème data (SONAR) via la DMP Permutive, développement des segments d’audience mixant contextuel, comportemental et engagement, test de data clean rooms avec Decentriq…
Nous continuons évidemment à tester en parallèle les différentes solutions marché pour valoriser au mieux nos impressions vendues en open auction. Parmi elles, on peut citer Utiq, ID 5, Sirdata…
Craignez-vous qu'elle change quoi que ce soit à celle du buyside ?
Il faut tenir compte du contexte marché. Le buy-side est assez prudent, peu enclin à changer ses habitudes et se repose toujours beaucoup sur les cookies tiers. Or, pour que les alternatives soient efficaces, il faut qu’elles soient adoptées à large échelle, par le sell-side comme par le buy-side.
Cette annonce va retarder encore le pivot vers la first party, mais sans fatalité. A terme, nous avons la conviction que cela valorisera d’autant plus les inventaires et éditeurs premiums.