22 octobre 2025
Temps de lecture : 4 min
Crédits : Erik Mclean
Dans la première partie de notre dossier dédié à la mesure audio, nous avons fait le point sur l’explosion et la fragmentation des usages audio par l’irruption du numérique.
Le marché audio connaît en effet une forte croissance portée par la digitalisation et la diversité des formats (radio, podcasts, streaming, livres audio, etc.), mais peine encore à valoriser pleinement son potentiel auprès des annonceurs.
Malgré une audience massive (82 % des Français écoutent de l’audio chaque jour), l’absence de mesure unifiée limite sa compétitivité face aux grandes plateformes numériques.
Néanmoins, de nouvelles méthodologies et la montée en puissance de l’audio digital, qui ouvre de nouvelles opportunités de ciblage, semblent mener vers une audience consolidée. Une marque n’aura plus une vision silotée, mais une vision globale de l’impact de sa marque. C’est ce que nous explorons dans cette seconde partie de ce dossier.
Suivant l’exemple initié par la télévision, l’industrie audio s’oriente vers une méthodologie complète. L’enjeu est de pouvoir valoriser l’ensemble de ses points de contact et de répondre aux exigences de planification cross-média des annonceurs.
« Nous travaillons actuellement à un système hybride qui permettrait de faire converger EAR > National & Local et EAR > Insights et les enrichir avec les datas issues de l’écoute de la radio numérique », explique Julien Rosanvallon, Directeur Général Adjoint de Médiamétrie.
La future méthodologie de référence, en cours de développement avec Alliance de la Radio, qui fédère l’ensemble des radios privées françaises, reposera sur la fusion de trois sources de données complémentaires :
-Le socle déclaratif : L’enquête téléphonique à grande échelle (EAR > National & Local) continuera de fournir la base la plus large et la plus exhaustive, garantissant la mesure de tous les modes et lieux d’écoute.
-L’apport de la mesure automatique : Les données granulaires issues du panel d’audimètres portés (EAR > Insights) viendront affiner la connaissance des comportements, notamment en mesurant avec précision les duplications d’audience entre les différents supports et stations.
-L’hybridation avec les logs digitaux : Le modèle sera enrichi par l’intégration des données de consommation réelles des flux digitaux et des podcasts, certifiées par l’ACPM. Cette brique apportera une vision exhaustive et précise de l’univers numérique.
L’ACPM joue un rôle important dans cette hybridation. Son rôle est de contrôler la diffusion des médias mesurables grâce aux données de voie retour (retour d’informations depuis le récepteur vers le diffuseur ou la plateforme, permettant une mesure fine, en temps réel, des usages audio).
« L’ACPM dispose donc de toute la data issue de l’écoute de la radio en ligne et nous sommes prêts à la mettre à la disposition des mesures du marché », déclare Jean-Paul Dietsch, Directeur Général de l’ACPM.
Le bénéfice principal de cette mesure unifiée est un changement de paradigme : on ne mesurera plus seulement l’audience d’un canal (la FM, le streaming), mais l’audience consolidée d’une marque audio dans sa globalité.
Pour les agences et annonceurs, cela donne la possibilité de réaliser un médiaplanning précis au niveau de la marque, en calculant une couverture détaillée et surtout dédupliquée sur l’ensemble de ses déclinaisons.
Cette quête d’une mesure unifiée n’est pas une spécificité française. Les discussions au sein de l’ECT, l’association européenne des régies publicitaires, montrent qu’il s’agit d’une nécessité stratégique à l’échelle du continent.
L’objectif est de pouvoir à terme agréger les inventaires publicitaires de différents pays pour construire des offres paneuropéennes capables de concurrencer les acteurs mondiaux comme Spotify.
Au sein de l’écosystème, l’audio digital a atteint une grande maturité en matière de consommation et de mesure de performance, se positionnant sans retard face aux autres grands leviers comme le display ou la vidéo. L’audio digitale ouvre ainsi de nouvelles possibilités aux annonceurs.
Lors des CGV 2026, toutes les régies ont observé une adoption croissante des formats sonores diffusés via Internet :
–Sur RMC, 61 % de l’écoute totale se fait en audio digital, contre 54 % pour l’ensemble des radios.
-L’audio digital représente près de 30 % du volume d’écoute quotidien des stations de NRJ Group et se fait aux deux tiers sur le smartphone.
-En un an, l’inventaire audio digital de Lagardère Publicité News a doublé et permet de toucher chaque semaine 5,1 millions d’audionautes uniques et, sur Europe 1, 26 % de l’audience est désormais numérique.
-Sur la dernière saison, les stations de M6 Unlimited comptaient 9 millions d’auditeurs quotidiens, dont 2 millions en digital. Les podcasts du groupe ont généré 37,8 millions d’écoutes en septembre 2025.
Selon Geoffrey Fossier, Global CMO d’Audion, grâce à une approche agnostique s’appuyant sur des partenaires spécialisés, il est désormais possible de couvrir l’intégralité de l’entonnoir de conversion :
–Haut de l’entonnoir (notoriété) : Mesure du souvenir publicitaire, de la notoriété assistée, de la considération et de l’intention (via des partenaires comme YouGov, Kantar).
–Bas de l’entonnoir (action) : Mesure des visites en magasin (drive-to-store via Adsquare, oKube) et des conversions sur site web (via Veritonic).
Il estime que le prochain défi de la mesure de performance est de connecter directement l’exposition publicitaire audio aux ventes physiques réelles. L’enjeu est de dépasser la simple mesure de la visite en magasin pour mesurer la conversion finale : l’achat.
« Cela passera par l’intégration des données caisses des distributeurs. C’est une démarche complexe qui pourrait être menée via des partenaires spécialisés comme MarketingScan, capables de faire le lien entre les deux univers », complète-t-il.
Pour inciter les agences et annonceurs à considérer l’audio dans leur mix média, NRJ Global, en collaboration CSA Data Consulting, a mis au point un outil de ROI prédictif.
Il s’agit d’une modélisation basée sur l’intelligence artificielle qui permet d’estimer en amont les performances d’une campagne. Son utilité est stratégique : pour un budget et un secteur donnés, l’outil peut prédire l’impact attendu sur les ventes incrémentales et le retour sur investissement, permettant ainsi à l’annonceur de limiter son risque décisionnel avant même de lancer sa campagne.
La mesure audio est donc en pleine mutation. Le passage d’un modèle fragmenté, source d’incertitudes, à un système hybride, unifié et performant, redéfinit les standards du marché. In fine, cette convergence des mesures, adossée à la prédiction de performance, arme l’écosystème audio pour sa prochaine bataille : non plus seulement prouver sa portée de masse, mais démontrer de manière irréfutable sa contribution directe à la croissance des entreprises.
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