4 novembre 2025

Temps de lecture : 4 min

Social publishing : face à la chute du display, les médias trouvent une nouvelle manne sur les réseaux sociaux

Face à l'érosion des revenus du display, les plateformes sociales sont désormais une source cruciale de monétisation pour les marques média. En étant caution des annonceurs, elles sont de plus en plus nombreuses à adopter le modèle du social publishing, levier de croissance rapide et récurrent. Explications avec Hocine Sadki, co-fondateur de Brands to Medias.

Pourquoi est-ce que de plus en plus de marques médias se tournent-elles vers le social publishing (aussi appelé trusted social ads) aujourd’hui ?

L’impératif pour les marques médias est de trouver de nouvelles lignes de revenu en dehors de l’Open Web. Cela est dû au fait que les revenus display sont en décroissance sur leurs sites. Les investissements massifs des médias sur les réseaux sociaux, initialement destinés à faire exister et pérenniser leur marque dans l’esprit collectif, doivent désormais être monétisés.

Cette urgence s’accélère également en raison de l’émergence des LLM (Large Language Models) qui menacent la génération de trafic vers les sites médias, rendant l’ADN même de la marque média crucial pour le futur modèle économique.

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Qu’est-ce que le « social publishing » et en quoi est-il différent du brand content ?

Le social publishing est une stratégie visant à utiliser la caution de la marque média pour diffuser un message publicitaire de l’annonceur sur les réseaux sociaux.

Contrairement aux opérations de branding ou de brand content qui restent très haut de funnel (notoriété, engagement), le social publishing permet de descendre dans les KPI en termes de funnel. Il se concentre sur la performance pure, c’est-à-dire la vente e-commerce, la génération de leads ou le téléchargement d’application.

Sur quels réseaux sociaux les médias ont-ils construit les communautés les plus fortes ?

Aujourd’hui, les principaux réseaux pour les médias sont Meta, qui comprend essentiellement Facebook et Instagram. Meta demeure la plateforme incontournable sur laquelle il faut être présent, car elle reste la plus investie publicitairement en Europe.

TikTok est en train d’émerger petit à petit comme un levier clé. Des marques médias spécifiques, notamment celles comme Konbini et Brut, sont déjà particulièrement représentées sur TikTok et Snapchat, contrairement aux médias d’actualité traditionnels. Certains médias sont parvenus à construire des communautés très fortes, capables d’atteindre plus d’un million de followers sur leur page.

Quel est l’avantage principal pour l’annonceur d’utiliser la caution d’un média ?

L’avantage principal réside dans la performance : l’association d’un message de marque à la caution d’un média permet de casser le plafond de verre des performances historiques de l’annonceur sur les réseaux sociaux. Ce modèle est capable d’insuffler un boost de performance de 30, 40, 50 % voire plus. L’annonceur garde son propre écosystème de pilotage de campagne, ce qui lui permet de conserver l’historique de ses données et de continuer à travailler sur cette performance.

De plus, la caution média apporte une réassurance de marque. Sur les réseaux sociaux, où n’importe qui peut être annonceur à partir de 10 € par jour et où pullulent de nombreux annonceurs peu fiables (dropshipping* ou arnaques), le consommateur est plus sensible à une publicité poussée par une marque média reconnue.

Comment les médias et leurs partenaires garantissent-ils la probité des annonceurs dans ce modèle ?

Pour protéger la marque média, une étude de probité est menée en amont sur les annonceurs. L’objectif est de s’assurer qu’il ne s’agit pas de dropshippers ou d’annonceurs qui pourraient cacher des arnaques. Nous utilisons des indicateurs internes, comme des scores de qualité. Par exemple, l’une des pratiques est d’éviter de signer des annonceurs qui ont été créés il y a moins d’un an.

Quel est le modèle économique derrière le social publishing ?  Les plateformes sociales y perdent-elles de l’argent ?

Le modèle économique est basé sur le commissionnement. Par exemple, Brands To Medias prélève une commission sur montant investi par les annonceurs sur les plateformes.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce modèle est gagnant-gagnant. Si le social publishing permet de booster les ventes de 30 à 50 %, l’annonceur dépense davantage. Par exemple, un annonceur qui dépensait 10 000 € par mois pourrait passer à 15 000, 20 000 ou 25 000 € par mois d’achat d’espace sur Meta en travaillant avec ce modèle. Le social publishing agit comme un vecteur de croissance supplémentaire pour les plateformes, tout en permettant de rémunérer les médias français et européens.

Comment les campagnes de social publishing sont-elles optimisées ?

Les annonceurs sont très axés sur l’A/B testing créatif. Le social publishing ajoute une variable supplémentaire à cette démarche : la variable caution de la marque média. Cela démultiplie les possibilités d’A/B testing (par exemple, tester 10 créations sur cinq marques médias différentes).

Cette approche permet de s’affranchir parfois des logiques très verticalisées. Par exemple, un annonceur de systèmes d’alarme a pu constater qu’il fonctionnait bien en utilisant la caution d’une marque média plutôt orientée public féminin, remettant en question les hypothèses initiales de ciblage très strictes.

Le modèle de la « caution » peut-il s’étendre aux influenceurs et créateurs de contenu ?

Oui, l’extension du modèle de caution au-delà des marques médias classiques est un sujet d’intérêt. Pour les annonceurs qui souhaitent toucher une audience comme la jeunesse sur TikTok, où les médias classiques ne sont pas encore bien implantés, passer par un influenceur reconnu peut être une solution. L’enjeu est de consolider l’existence de ce système de confiance dans le temps.

Le social publishing va-t-il peser de plus en plus lourd dans les revenus des médias ?

Le marché est encore très jeune. Cependant, il commence à devenir significatif pour les groupes médias qui possèdent des marques très fortes ou une grande pluralité de marques dans différentes thématiques.

Le plus important est qu’il apporte de l’incrément (nouveaux annonceurs et nouveaux budgets). Le marché est en accélération rapide, avec des taux de croissance de plus de fois deux en termes de revenu sur des périodes courtes. Cette croissance rapide et le fait que les groupes médias s’emparent du sujet à bras-le-corps témoignent du potentiel.

* méthode de vente en ligne dans laquelle le vendeur ne garde pas de marchandises en stock. Le vendeur n’ayant aucun contrôle sur la marchandise qu’il revend, il est possible d’avoir mauvaise surprise après la commande.

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