7 juillet 2025

Temps de lecture : 3 min

Comment l’IA impacte le retail media en ligne et en magasin

Le retail media, levier de croissance majeur du e-commerce, voit ses contours évoluer sous l’effet de l’IA générative. Quels usages émergent ? Quelles opportunités publicitaires et acceptabilité en point de vente ? Tour d’horizon d’une mutation en cours avec Bruno Delahaye, Associé chez Cathay Innovation, en charge de la verticale consommation et distribution.

Image réalisée à l'aide de l'IA

En mai dernier, Cathay Innovation a clôturé son dernier fonds de capital-risque à hauteur d’un milliard de dollars, ce qui en fait le plus grand fonds dédié à l’IA au sein de l’Union européenne. Par ailleurs, vous identifiez le retail media comme l’un des leviers les plus puissants de transformation du commerce. Quel est l’impact de l’IA sur le retail media actuellement ?

Bruno Delahaye, Associé chez Cathay Innovation, en charge de la verticale consommation et distribution.

Bruno Delahaye: De manière intrinsèque, il y a déjà de l’IA dans le retail media, notamment du machine learning car il s’agit de proposer des publicités qui sont pertinentes pour le client final. Puisqu’il faut tout mesurer, que ce soit en display ou en search, il est important de diffuser des publicités qui ont du sens pour que cela ait un impact sur les ventes.
Les changements récents liés à l’IA générative ont deux impacts. Le premier est d’automatiser plusieurs aspects du retail media: amélioration des moteurs de recommandation, meilleure personnalisation des pages, meilleure optimisation dans la création des campagnes. Cela permet de réduire les coûts et le temps nécessaires pour créer une campagne. Cela profite particulièrement aux plus petits resellers.
L’IA a aussi un impact sur l’e-commerce d’une manière plus générale. Les moteurs de recherche sont en train d’être transformés. Ils se baseront sur la compréhension de la requête et le contexte. La question est de savoir comment le retail media va s’intégrer aux agents d’achat, dans un parcours d’achat qui se transforme.

Vous voulez dire que les requêtes réalisées sur les sites d’e-commerce seront similaires à celles que nous pouvons faire sur ChatGPT et consorts ? Une requête en langage naturel en fonction d’un besoin spécifique ?

Aujourd’hui, lorsqu’on effectue une recherche sur un site d’e-commerce, nous avons une approche produits: on va taper « chaussures » par exemple. Mais avec l’essor de l’IA générative, les recherches sont de plus en plus contextuelles. Si je vais sur le site d’un magasin de sport, je ne vais plus taper « raquette », mais « je débute en tennis, de quoi ai-je besoin »? Dans un futur proche, les sites pourront lister tout ce dont cette personne a besoin, de la raquette aux chaussures de sport. Les résultats seront multi-catégories. Pour le retail media, cela va changer beaucoup de choses. Les produits ne seront plus reliés à des mots-clés mais à des contextes de recherche. Les positions des publicités seront différentes, car la structuration de la page sera différente.

L’IA générative va aussi impacter le DOOH?

L’IA va en effet permettre d’accélérer sur le DOOH (Digital Out Of Home), qui est en quelque sorte l’enfant pauvre du retail media. On voit que l’IA devient un compagnon d’achat, pas seulement sur le digital, mais aussi en point de vente. Les lignes entre digital et physique sont de plus en plus floues et la tendance du ROPO (Research Online Purchase Offline) est encore plus d’actualité.

Comment l’usage de l’IA se matérialise-t-il concrètement en magasin ?

En ligne, nous sommes habitués à tracer certaines informations, car cela permet un bénéfice perçu: des offres personnalisées. Ce « deal » implicite est généralement accepté. En revanche, en magasin, ce type de traçage passe moins bien. Il existe une forme de résistance. Pourquoi ? Parce que le consommateur n’en perçoit pas encore la valeur ajoutée ou qu’il n’y a pas de cadre clair sur ce qui est fait avec ses données. Ce qui n’est pas clair aujourd’hui, c’est ce que le consommateur final considère comme acceptable ou non.
Des technologies existent pourtant. Par exemple, des caméras peuvent analyser les comportements sans identification directe (par le biais d’avatars, selon les vêtements d’un client par exemple) pour suivre un parcours dans le magasin. Techniquement, on peut même afficher du contenu personnalisé lorsqu’un client passe devant un écran.

Cela rappelle l’échec des beacons, ces petites balises bluetooth qui permettaient d’envoyer des notifications sur les portables des clients lorsqu’ils passaient à proximité. Quel était leur point faible selon vous ?

Le souci des beacons, c’est qu’ils ont été pensés dans une logique commerciale. Si l’objectif est seulement de pousser un produit, cela ne fonctionne pas. Ce n’est pas acceptable pour le client. En magasin, les tentatives de personnalisation ont souvent échoué parce qu’elles manquaient d’intelligence ou d’utilité perçue. Le retail media ne fonctionne que s’il apporte une vraie valeur ajoutée, via de la personnalisation et de la pertinence. Et cela est vrai en ligne et en magasin.
Il peut y avoir une autre manière d’intégrer l’IA dans les points de vente : via des robots conçus pour interagir avec les humains. Ces robots peuvent accompagner les clients dans leur parcours d’achat. L’enjeu, ici, c’est de voir comment intégrer le retail media dans ce type d’approche. Par exemple, un robot pourrait être « habillé » par une marque spécifique. Il devient alors à la fois un assistant et un support média. Cela ouvre des perspectives pour les annonceurs.

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