29 septembre 2025
Temps de lecture : 5 min
La spécificité du secteur cinéma, du point de vue publicitaire, tient en la nécessité de promouvoir des films qui sont par définition des produits uniques. Entre data, recours aux réseaux sociaux et valorisation de ses propres médias, les cinémas Pathé adaptent chaque campagne au profil du film et à ses spectateurs, tout en explorant des synergies locales et digitales, avec toutefois un objectif commun : convertir. Explications avec Béatrice Tourvieille, sa directrice générale adjoint marketing et digital.
Tout d’abord, il faut distinguer nos actions de celles menées par les distributeurs de films et les studios, qui travaillent la notoriété des films, un aspect souvent au cœur de leur promotion. De notre côté, nous travaillons plutôt la partie transformation, à la fin du parcours d’achat. Notre situation est comparable à la répartition des rôles entre les enseignes de grande distribution et les marques nationales. À l’instar des enseignes, nous avons accès aux données transactionnelles, que nous activons pour cibler des spectateurs connus ou des jumeaux statistiques. De ce fait, notre mix-média est très digitalisé et principalement basé sur les réseaux sociaux. Le CRM est également un levier très puissant pour nous, en complément de notre owned media, qui repose sur notre site web, notre application mobile et les publicités diffusées avant nos séances. Le tout avec un ancrage local et la volonté de réaliser des ciblages très fins. En réalité, chaque film doit être envisagé comme un prototype, et il faut adapter le mix-média à chacun. Enfin, nous faisons aussi un peu de offline avec de l’affichage ou des partenariats radio, mais là encore dans une logique d’activations locales pour soutenir tel ou tel cinéma et promouvoir une nouvelle expérience IMAX, Dolby Cinema ou 4DX.
Il y a d’abord un important travail autour de la data afin de réaliser des ciblages très spécifiques, essentiellement en fonction des anciens films vus par les spectateurs. Cela dépasse la logique de persona ou de critères socio-démographiques, puisque nous menons un vrai travail collaboratif avec le distributeur pour identifier des appétences pour des acteurs, des réalisateurs, des courants cinématographiques… On peut donc effectuer un ciblage spécifique par film. Ensuite, nous activons abondamment les réseaux sociaux et opérons des arbitrages selon ces ciblages. De façon très intuitive, nous privilégions Snapchat pour cibler les jeunes et Facebook pour cibler les seniors. TikTok a aussi pris une place très importante dans le secteur du cinéma. Cela va plus loin : les réseaux sociaux sont des canaux très visuels, qui permettent de mettre en valeur un film et ses bandes annonces. On peut également approfondir l’éditorialisation de nos campagnes, par exemple avec des interviews d’acteurs pour toucher les cinéphiles ou des filtres AR et des images illustrant l’expérience 4DX pour attirer les jeunes. Enfin, si tout dépend bien sûr de l’objectif de la campagne, la possibilité d’activer notre donnée est un critère très important dans le choix d’un réseau.
La télévision est plutôt utilisée par les distributeurs dans une logique de haut de funnel. Mais il est vrai que la digitalisation de la TV permet d’imaginer de nouvelles opportunités. Les tests vont sans doute se multiplier, même si nous continuons à nous focaliser sur des médias dont l’efficacité a été éprouvée. Changer les habitudes prend du temps. Il faut développer les compétences, prendre en main les outils… Mais j’ai le sentiment que nous entrons dans une phase d’activation de ces nouveaux canaux plus concrète. Et c’est intéressant de voir les médias offline adopter la logique du digital, qui devient référent grâce à ses capacités de ciblage et sa volonté de mesurer les performances, même si le sujet de l’attribution multi-canal reste toujours aussi complexe…
Oui, nous sommes sur ces tendances. Je pense que ces résultats illustrent bien le statut de canal publicitaire historique du cinéma et la propension du marché à valoriser les canaux qui suscitent le plus d’attention. Le cinéma excelle dans ce domaine, avec des spectateurs qui reviennent en salle et qui sont très réceptifs aux messages diffusés.
On en revient aux thèmes abordés au début de l’entretien, mais l’une des priorités est l’amélioration de la collecte et de la valorisation de la donnée. Ensuite, il s’agit d’améliorer et de fluidifier le parcours client, de la découverte de l’offre au placement en salle, en passant par l’achat d’une place ou d’un produit annexe. Sur ce dernier point, nous explorons de plus en plus notre dimension retail, notamment pour voir comment construire des promotions autour de nos offres de restauration, par exemple. Mais, dans l’ensemble, l’enjeu sur nos assets comme le site, l’app ou les bornes en magasin est de trouver un compromis entre, d’un côté, l’efficacité du parcours et in fine la conversion, et d’un autre côté, la découverte de l’offre au travers de recommandations éditorialisées, qui sont aussi importantes au cinéma.
Nous avons plutôt tendance à privilégier les actions push à l’intérieur de notre application plutôt que de chercher de nouveaux canaux. Tout est question d’équilibre : il apparaît, par exemple, que nos spectateurs fidèles vont très souvent sur l’application mobile. Dès lors, comment leur suggérer les événements et contenus les plus pertinents sans perturber leur navigation ou mettre une pression trop importante, via un excès de notifications par exemple ? L’objectif est de rendre notre application plus communicante.
Je pense que tous les responsables marketing se penchent sur l’IA aujourd’hui. Nous avons mené, de notre côté, beaucoup de tests sur des fonctionnalités liées au service client et notamment le traitement des demandes des spectateurs et l’enrichissement de notre CRM avec Salesforce. Nous travaillons aussi l’aspect créatif, soit pour réduire les coûts de production des assets, soit pour améliorer la qualité de certaines campagnes événementielles diffusées sur les réseaux sociaux. Enfin, nous l’utilisons aussi pour faire de l’analyse prédictive et du pilotage de la performance, mais à une échelle plus large que la performance média ou marketing. Il s’agit de la performance globale de l’entreprise.
Pour aller plus loin, découvrez le passage de Béatrice Tourvieille dans Future of l’émission, à l’occasion de la première diffusion d’un match de L1 au cinéma en mars 2025.
Retrouvez plus de témoignages de CMO lors de l’évènement Future of CMO qui se déroulera le 14 octobre prochain à Paris !
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