20 juin 2025
Temps de lecture : 4 min
Il y a beaucoup de choses dans votre question. Je vais faire un peu d’historique. Nous avons collaboré avec Google depuis presque cinq ans maintenant. L’idée derrière Privacy Sandbox était de créer un environnement plus sûr au niveau des données et plus respectueux de la vie privée pour les utilisateurs sur Internet. Et aussi pour les marques qui voulaient les toucher, mais de façon non intrusive.
Le défi de Privacy Sandbox est de mettre en place un nouveau cadre de confidentialité dans un écosystème avec de nombreux acteurs, chacun ayant des intérêts différents et cela s’est révélé assez compliqué. Notre collaboration avec Google a été très positive. Évidemment, nous avons beaucoup appris pendant ces cinq années. Il y a eu des hauts et des bas, des arrêts, des reprises… Et finalement, la décision a été prise de maintenir les cookies tiers.
Nous avons appris deux choses très importantes. La première, c’est qu’il est possible d’utiliser d’autres méthodes pour proposer des recommandations produits pertinentes, ce qui est au cœur de notre métier, sans utiliser de cookies comme clé d’entrée ou de ciblage. La deuxième chose que cela a permis, c’est d’accélérer notre avancée en IA. Avant même que cela devienne un grand sujet. C’est d’ailleurs le sujet à la mode cette année à Cannes.
Ce que Privacy Sandbox nous a permis, c’est d’avancer dans notre usage de l’IA. De passer du machine learning au deep learning, à l’inférence et à de nouvelles façons de faire des recommandations produits pertinentes pour vous ou moi, quand on navigue sur Internet ou une application, sans avoir tous les signaux de données qu’on avait avec les cookies. Donc sur ces deux aspects, ça a été une super aventure. Nous avons aussi compris qu’il était très difficile d’aligner les intérêts de toutes les parties qui devaient « gagner » pour que ce nouveau cadre puisse fonctionner.
Deux choses entraient en collision. D’un côté, les marques, surtout celles axées sur la performance, qui voulaient mesurer les ventes réelles générées. C’est très difficile à prouver avec les signaux flous qui sortent du deep learning. Autre point : le marché n’était pas assez développé pour faire circuler l’argent vers les éditeurs. Malgré ces freins, l’équipe de Google a eu le mérite de continuer, de tester différentes approches.
Oui, Google est un très bon partenaire pour nous. Ce qui est moins clair, c’est comment tirer profit de tout ce que nous avons appris. Nous avons beaucoup investi pendant cette période. Je ne suis pas sûr que tout le monde dirait la même chose que nous sur la valeur de cet investissement. Ça a vraiment aidé à structurer notre stratégie « addressable » multi-canaux. Et on va continuer à investir dans ce sens.
Je pense que lorsqu’on fait quelque chose avec une intention forte, très produit, c’est important d’être très clair sur le problème qu’on veut résoudre et de d’embarquer toute l’industrie avec soi. J’aimerais que Google ouvre YouTube et y applique Privacy Sandbox pour le ciblage, et notamment pour les audiences protégées.
Gemini (le modèle de langage de Google, ndlr) est en train de récupérer une partie de la recherche perdue. Cela pose une question : comment la mémoire que Gemini a de vous ou moi, en tant qu’utilisateur, peut être utilisée pour offrir une recommandation produit parfaite ? C’est une approche de la vie privée très différente de celle des cookies. Et je pense que Gemini pourrait tout à fait s’intégrer au concept de Privacy Sandbox, sur le plan théorique.
Beaucoup de choses sur lesquelles nous avons travaillé dans Privacy Sandbox comme les environnements d’exécution sécurisés et les débuts de la modélisation privée sont très pertinentes ici. Maintenant, est-ce qu’on peut et est-ce qu’on doit vraiment aller dans cette direction… ce n’est que le début de la discussion.
En fait, l’avenir est déjà là. Sur l’open web ou tout domaine qu’un agent peut explorer, indexer ou appeler dans le cadre d’un modèle de raisonnement, l’expérience utilisateur change totalement. Car l’utilisateur n’atteint peut-être jamais le site source de l’information qui a servi à répondre à sa requête. Donc l’un des enjeux, c’est de trouver un équilibre entre les créateurs de contenu, grands ou petits, et les agents IA qui répondent à ces requêtes.
Encore une fois, on pense d’abord aux recommandations produits, mais il y a de nombreux autres cas d’usage où des gens comme moi utilisent OpenAI, Claude ou d’autres modèles IA. Comment le contenu sera-t-il découvert, monétisé et présenté à un utilisateur ? Ça, c’est une partie du problème. L’autre partie, c’est que la plupart des entreprises avec qui nous travaillons, qu’elles soient créatrices de contenu, retailers ou marque, se demandent toutes comment elles peuvent faire partie de cette nouvelle expérience.
Je pense qu’on va voir de plus en plus d’interactions de ce type sur les sites e-commerce et certainement aussi sur les sites des éditeurs de contenu. L’exemple du Time Magazine aux États-Unis est intéressant : ils ont commencé à intégrer des parcours utilisateurs assistés par agent. Je pense qu’on verra beaucoup d’initiatives similaires. Mais ce sont deux logiques très différentes. L’une consiste à envoyer l’utilisateur ailleurs avec une réponse immédiate. L’autre consiste à enrichir l’expérience utilisateur directement sur le site. On verra ce que les consommateurs préfèrent au final, que ce soit pour faire du shopping ou pour chercher des informations.
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