ARPU : les recettes des réseaux sociaux pour augmenter le revenu par utilisateur


  • Comment les grandes plateformes sociales s'y prennent-elles pour se démarquer dans un univers hyper concurrentiel ? Et quelles sont leurs tactiques pour optimiser le revenu qu'elle dégage pour chaque utilisateur ? Eléments d'analyse.

+23%, c’est la croissance des investissements publicitaires en France sur le canal réseau social, porté par deux dynamiques majeures : l’explosion des formats courts et la bascule vers des modèles propres au shopping. Dernier exemple en date : l’intégration sans couture des achats de produits Amazon depuis TikTok.

Au-delà de cette traction folle, certaines plateformes semblent mieux tirer leur épingle du jeu que d’autres. Dans un univers hyper concurrentiel, où le niveau d’attention du visiteur est très limité, le nerf de la guerre, c’est l’amélioration de leur ARPU (Revenu moyen par utilisateurs) dans un univers à l’attention limitée. Passage en revue des stratégies pour l’augmenter.

1 – Une adoption massive

Les réseaux sociaux sont mécaniquement engagés dans une course à l’hyper-croissance. Non pas pour capter tout le marché car, à la différence du search, il y a naturellement de la multi-adoption. Mais pour deux raisons assez simples :

·       Atteindre une taille critique pour devenir une plateforme incontournable dans les plans medias

·       Bénéficier des effets de réseaux, à savoir que l’usage de la plateforme s’améliore au fur et à mesure de son adoption grand public

Conséquence, la course au milliard d’utilisateurs ne cesse de s’accélérer. avec TikTok  n’a ainsi eu besoin que de 5 petites années pour franchir ce cap. Plus récemment encore, c’est Threads, l’arme anti-X de Facebook qui a atteint lui les 175 millions en quelques mois, malgré un contexte juridique compliqué.

Je rappelle que lorsque Facebook rachète Instagram, le réseau social ne compte que… 30 millions d’utilisateurs. Que comprendre ? A l’image de Messenger, Whatsapp… la croissance inhouse dans un écosystème déjà existant reste le plus sûr moyen de franchir l’échelle de la massification.

Une dynamique par exemple que peine à prendre X ou Snapchat, ce qui explique en partie leur faible ARPU aujourd’hui.

A l’inverse, la stratégie de premiumisation n’a pour le moment que rarement porté ses fruits, que l’on songe à ClubHouse par exemple ou à l’inverse Telegram sur un autre positionnement qui malgré 840 millions d’utilisateurs ne génère actuellement que… 40 centimes par users.

2 – La diversification des inventaires

C’est évidemment la clé pour étendre à peu de frais son inventaire publicitaire. Et cela reste la voie royale qu’ont emprunté à peu près tous les réseaux sociaux. LinkedIn dernièrement en lançant le feed video par exemple mais aussi Facebook/Youtube en adoptant les Story/Réels, faisant fi des critiques sur un manque d’imagination car cela revenait à copier Snapchat/TikTok.

Une chose est sûre : le mono-format tel que l’a symbolisé Vine (video courte) ou BeReal est pertinent au démarrage pour marquer un positionnement différent, mais peut conduire à un rapide essoufflement s’il n’y a pas de volonté de diversification rapide

Youtube l’a très bien compris qui, sans renier ses spécificités, n’a pas hésité à prendre le meilleur des autres réseaux sociaux. Résultat, aujourd’hui, + de 2/3 des annonces sont consommées sur de la TV connectée avec un CPM proche des plateformes digitales. Mieux : depuis le lancement des vidéos Shorts en septembre 2020, le CA a doublé en 4 ans !

C’est le sacre ici de Performance Max qui a permis de monétiser facilement un inventaire parfois boudé par les annonceurs car trop haut de funnel, mais aussi le sacre du contenu.

Car aujourd’hui, pour attirer toujours plus d’utilisateurs, Youtube capitalise certes sur les formats longs et courts, mais aussi et de plus en plus sur des formats interactifs type podcasts, streamings et depuis peu chaînes TV.. au point d’être le 2ème réseau social en terme de temps passé sur le mois : 28H vs 34H TikTok

3 – La rétention, au cœur du système

Un moyen d’accroître artificiellement les inventaires publicitaires est d’augmenter le taux d’engagement. C’est ce vers quoi d’ailleurs Netflix a décidé de basculer cette semaine en annonçant qu’à partir de 2025, la plateforme ne communiquera plus sur la croissance du volume d’abonnés, déjà très haut, mais plutôt sur le temps passé sur la plateforme.

Un actif sur lequel d’ailleurs TikTok joue une grande partie de sa traction, lui le réseau social le plus addictif : 95 minutes par jour, soit 2 fois plus qu’Instagram ! Et 88% des vidéos visionnées avec le son activé. De quoi multiplier les possibilités d’affichages publicitaires

Mais le revers de la médaille est que les utilisateurs engagés avec le réseau social chinois rechignent à cliquer sur les CTA des annonces. Au point que selon la dernière étude de TikTok for Business, plus d’un utilisateur sur 2 retarderait sa visite sur site pour rester sur la plateforme. Un défi donc pour les annonceurs de mesurer la contribution réel du résea

4 – La bascule vers un modèle freemium

C’est ce qu’ont très bien compris certains réseaux sociaux depuis quelques années. Alors qu’en 2015, seul LinkedIn proposait une version améliorée basée sur un abonnement, aujourd’hui, le réseau professionnel a été rejoint par 3 acteurs : X, Youtube & Snapchat.

Avec à la clé, un pivot hyper intéressant.

Et des revenus non négligeables : 1,7 milliards de dollars pour Linkedin en 2023 ; 400 millions pour Snapchat et 11 milliards pour Youtube Premium qui compte 100 millions d’abonnés.

Une dynamique qui à mon sens risque de faire florès tant elle adresse 3 problématiques de notre temps

·       La lutte contre le trop-plein publicitaire et la protection de la vie privée. Facebook et Instagram ont créé des hauts le cœur lorsqu’ils ont annoncé le déploiement de formule payante pour ceux qui refusaient l’acceptation des cookies

·       La diffusion d’un service ++ : la SaaSification des réseaux sociaux est en marche et les utilisateurs les utilisent aujourd’hui comme outil pour développer leur business//leur personal branding/leur communauté

·       La volonté de se différencier. Pas anodin d’ailleurs que sur le search des modèles hybrides émergent comme SearchGPT, Perplexity jetant ainsi les bases d’un web à deux vitesses

C’est sûrement cette dernière approche autour de modèle freemium qui risque de se démocratiser de plus en plus, manière de contrer la saturation des inventaires et les plateaux atteints sur le recrutement de nouveaux users.