- Le rachat de LineUp7 va permettre à Isoskèle d'asseoir sa position dans le secteur très concurrentiel du marketing digital en France.
- Manuela Pacaud, DG d'Isoskèle, et Jérôme Boiselle, co-fondateur de LineUp7, nous explique les tenants et aboutissants du deal.
Isoskèle vient d’officialiser le rachat de LineUp7, spécialiste de la data marketing fondé par Jérôme Boiselle et Olivier Guyomard en 2016. L’opération, finalisée en juin dernier, doit permettre à la filiale du groupe La Poste d’asseoir sa position dans le secteur (très concurrentiel) du marketing digital. C’est du moins l’une des raisons avancées par Manuela Pacaud, la directrice générale d’Isoskèle.
“C'était important de continuer à se développer pour rester parmi les acteurs français qui comptent dans le secteur.”, explique celle qui a conscience d’opérer dans un paysage où ça converge à tout va. “Entre les cabinets de conseil qui se mettent à faire de la communication et les groupes de communication qui se tournent vers la data et la tech.” Et au milieu de tout ça, des entités d’un nouveau genre, comme Dekuple, EDG ou encore Qwamplify, qui se sont construites en rachetant des structures indépendantes aux expertises complémentaires.
C’est un peu le même mode opératoire que suit Isoskèle puisque le groupe s’est, lui aussi, développé via du “build up” pour couvrir l’ensemble du parcours client. En 2021, c’était d’abord le spécialiste de l’acquisition et du marketing à la performance, TimeOne, qui avait rejoint le groupe. L’agence créative, St Johns, et le spécialiste des activations search et social média, Cybercité, ont suivi début 2022.
C’est aujourd’hui au tour de LineUp 7, spécialiste des sujets data et martech, de rejoindre son giron. L’acquisition de cette structure, très impliquée sur des sujets liés au marketing automation, à la customer data platform (CDP) ou aux programmes de fidélisation, permet à Isoskèle de muscler sa proposition de valeur sur le sujet ô combien stratégique de la personnalisation client.
“Entre la disparition des cookies tiers, qui complique la tâche des spécialistes de l’acquisition, et l’inflation qui touche certaines plateformes comme Meta et Google, c’est évident que l’optimisation de la donnée client va devenir clé pour beaucoup de structures”, observe un connaisseur du secteur. Manuela Pacaud ne dit pas autre chose lorsqu’elle rappelle que, “dans un contexte économique tendu, les entreprises se doivent de prioriser l’exploitation de leur data client.”
Un constat qui vaut également pour leur permettre de surfer sur la vague IA. “Il est indispensable d’avoir opéré tout un travail de structuration de ces données, en amont, avant de lancer des projets de ce genre”, ajoute Manuela Pacaud.
Structurer la donnée, c’est précisément le savoir-faire de LineUp7, une structure à la santé financière florissante dont on peut d’ailleurs s’étonner, en jetant un œil à ses comptes, qu’elle ait cherché à se vendre.
LineUp7, c’est ainsi 9,5 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2023 (en croissance de 12%) et 1 million d’euros de résultat net. Un exercice fiscal loin d’être isolé puisque la structure a réussi à se constituer un petit trésor de guerre au fil des années, en témoigne ses 5 millions d’euros en réserves. Pas vraiment la photographie financière d’une entreprise qui cherche à se vendre…
Jérôme Boiselle en convient volontiers, ce n’était pas le plan initial. “Nous avions mandaté une banque d’affaires pour nous lancer nous-mêmes dans une stratégie de build up.” Des cibles avaient été identifiées… jusqu’à ce que la rencontre avec Isoskèle ouvre la porte à une autre possibilité : une vente. “On est dans un marché qui va très vite, confie Jérôme Boiselle. Et on en est venus à se demander si on avait le temps de passer de 100 à 500 collaborateurs comme on l’ambitionnait à terme.”
Ce palier de 500 collaborateurs, Isoskèle vient justement de le franchir avec cette nouvelle acquisition. Le nouvel ensemble pèse, par ailleurs, un total de 110 millions d’euros de chiffre d’affaires. “Ce deal nous fait gagner 3-4 années”, estime Jérôme Boiselle. Notamment parce qu’il donne les moyens à LineUp7 de rivaliser, sur le long terme, avec ces grandes structures de conseil auxquelles la structure est opposée, de temps en temps, dans le cadre d’appels d’offres (comme ceux, gagnés, de Carrefour ou de LVMH).
“Isoskèle va aussi nous donner les moyens d’investir des domaines qui, comme l’IA générative, n’ont pas toujours de modèle économique dédié”, ajoute Jérôme Boiselle. Pas question, en revanche, de toucher aux fondations de l’entreprise, dont son identité de marque.
“Nous voulons préserver nos pôles d’expertise”, assure Manuela Pacaud. “Nous gardons notre autonomie, tout en profitant des synergies que nous offre le groupe”, complète Jérôme Boiselle. Et de donner l’exemple du cloud où LineUp7 est, pour l’instant, surtout positionné sur la technologie d’Amazon, AWS, alors que CyberCité est, lui, un spécialiste de Google Cloud Platform.
Dans un secteur qui s’internationalise à tout va, cette nouvelle association reste, avant tout, un projet franco-français. “Nos technologies pourraient s’exporter facilement mais nous préférons d’abord asseoir nos positions sur le marché français”, justifie Manuela Pacaud.